La Via Francigena d’Aoste à Rome

Jour 1 – Bremblens – Aoste – Nus

22.2.22, n’est-ce pas là une date de bon augure pour commencer cette nouvelle tranche de la Via Francigena ?

Trois mois et demi après être arrivée à  Bremblens en provenance de Reims, m’y revoici tôt ce matin, dans la pluie et le froid, pour reprendre ce pèlerinage vers Rome qu’est la ViaFrancigena. C’est d’abord mon frère Jean-Christophe qui me mène à la gare pour le train de 07.00 qui relie Morges à Martigny, puis c’est le 08.25 bus pour Aoste. Il ne fait pas encore vraiment jour. Je reconnais au passage les paysages parcourus à pied en été 2020. Dans la vallée et jusqu’à assez haut, il n’y a déjà plus de neige.

Le soleil se lève du côté suisse.

Mais au niveau du Lac des Toules, la neige est bien là et nous empruntons le tunnel du Gd-St-Bernard. Le passage de la douane se fait sans contrôle au début du tunnel. A la sortie côté italien, c’est le grand soleil.  La  descente dans la vallée a une qualité zen… à  moins que ce soit moi qui commence enfin à me détendre après une période plutôt intense de travail en Angleterre.

Paysage de lumière entre la sortie du tunnel du Gd-St-Bernard et Aoste

A Aoste, je décide de visiter la Cathédrale, fermée lors de notre passage précédent. On y joue de la musique. Belle ambiance de recueillement. Après une courte visite j’aborde un jeune homme noir qui passe l’aspirateur, pour lui demander s’il y a un sceau quelque part pour ma crédenciale.

Bon, mes premiers essais en italiens ne sont pas concluants, mais ce n’est pas trop grave car mon interlocuteur ne parle pas l’italien non plus, il est francophone. Ça marche. Il m’emmène dans un local privé et cherche partout ce sceau. Pas de chance, le curé doit l’avoir caché car personne ne le demande plus, Ça doir être parce que c’est encore l’hiver, ou à cause de la Covid qui semble encore bien présente en Italie,  si j’en juge par tous ces masques portés,  même dans les rues. Bon tant pis pour le sceau de la Cathédrale, je vais chercher celui de l’office du tourisme.

Ciel bleu sur Aoste

Selon mes apps, l’étape suggérée au sortir d’Aosta compte 28 km et va jusqu’à Chatillon. En plus c’est une étape classée difficile à cause du relief montagneux de la région. Je décide donc de la couper en deux et de passer ma première nuit à Nus.

Il fait super beau. Le vent qui vient des montagnes est le bien venu. Il me pousse le long des chemins et je me régale du silence, de l’espace et de la liberté d’être juste là, à mettre un pied devant l’autre.

La nature est très sèche et plutôt que la boue crainte, c’est la poussière qui est omniprésente. Je traverse des villages et des vignobles en terrasse. Contrairement à ce que j’ai lu dans mes guides, je trouve le chemin plutôt plat.

Mon chemin longe un canal d’irrigation du moyen-âge.

C’est quand même bien fatiguée que j’arrive à Nus. Je descends à l’hôtel Florian, où l’on me montre une porte d’entrée secrète, avant de fermer l’hôtel jusqu’au lendemain. Je serai seule dans l’établissement cette nuit. Pas de souci,  j’ai un bon lit et y dormirai plus de 9 heures de file.

Je passe la fin de l’après-midi sur mon téléphone à organiser l’étape du lendemain, rassurer ma famille que tout va bien, et discuter avec mon collègue Doug les nouveaux développements réjouissants de notre école de formation en Breathwork.

Je sors ensuite en ville pour trouver un restaurant. Il y en a un pas loin, mais il me faut attendre jusqu’à 7.30 pour qu’on me serve un délicieux risotto suivi d’un curieux, mais savoureux, thé de Noël, la seule tisane disponible.

Jour 2 – Nus – Chatillon

L’étape d’aujourd’hui est courte, alors je prends mon temps et ne sors de l’hôtel qu’à 9 heures après une excellente nuit et mon premier petit-déjeuner de cette VF italienne : 3 petits pains tout secs que je ne touche pas, une tranche de cake délicieux, 2 yogurts et une barquette de Nutella.

Le temps est absolument magnifique et chaud. Il n’y a pas de vent et j’ai tôt fait de transformer mes pantalons en shorts et d’enlever ma fourrure polaire pour continuer la marche en t-shirt.

Heureusement que cette étape n’est en réalité qu’une demi-étape, car je me perds et me re-perds, zigzaguant de part et d’autre du tracé de la Via Francigena. Et tout cela au vertical des pentes vraiment pentues du coin.

La VF suit les chemins de tourisme pédestre numéros 103 et/ou 3. Mais attention aux variantes .

Il faut bien dire que certains panneaux sont de véritables girouettes. J’en redresse quatre qui indiqueront la direction correcte… jusqu’au prochain coup de vent. Et puis il a les variantes de la VF qui font faire d’immenses détours sans crier gare.

Dans un village, je rencontre une femme qui vient laver ses pommes de terre à  la fontaine publique. Ah, si seulement mon italien était adéquat !!! J’aurais adoré bavarder avec elle comme j’ai bavardé sans ambages avec les gens que je rencontrais en France. Allez, la prochaine fois je me lancererai à  l’eau.  Promis-juré.

Des fontaines, il y en a partout, tout le long de la vallée. En fait ma bouteille d’un 1/2 litre fait juste l’affaire. À chaque fontaine j’en bois quelques gorgées et la re-rempli. C’est une solution de légèreté que j’apprécie, mon sac à dos pesant déjà dans les 8 kilos.

Vue du vignoble en direction de Nus.

Il n’y a pas grand monde sur le chemin. Juste quelques personnes qui promènent leur chien, et en tous cas pas d’autres pèlerins. Ce n’est pas la saison pour ça. Mes collègues italiens des réseaux sociaux ont tenté de me dissuader de venir à cette époque de l’année, me prédisant beaucoup de pluie et de froid. Mais j’ai de la chance, la météo est au beau fixe pour les deux prochaines semaines.

Par contre je vois pas mal de chats et deux lézards.

La VF se faufile derrière les maisons.

A midi je mange un sandwich apporté de Suisse. Celui-ci, comme celui de la veille d’ailleurs, a été préparé par ma fille et son amie avec beaucoup d’amour et de joie à l’idée de le déguster pendant leur voyage de retour en Angleterre. Malheureusement pour elles, et bien heureusement pour moi, elles ont oublié de les emporter. J’apprécie donc ce cadeau du ciel, en plein soleil sur la place de l’église de Chambave.

A certains endroits stratégiques, des panneaux oranges d’information touristique me renseignent en quatre langues sur l’économie, l’histoire et la culture du pays.

Un village abandonné se profile à l’horizon.

Les derniers kilomètres jusqu’à Chatillon sont durs. Chaque petite montée est un calvaire et je m’arrête souvent pour poser mon sac et reprendre mon souffle.

J’aurais voulu passer la nuit dans le couvent des frères bénédictins mais ils affichent complet. Je descends alors à  l’hôtel Dufour, qui n’offre que la nuitée.

Et je vais chercher un sceau pour ma crédenciale dans la belle église qui domine la place.

Jour 3 – Chatillon – Verrès

Après un petit-déjeûner rapide au café du coin (un capuccino et en pain au chocolat pour €2.40), j’achète une tranche de focaccia aux olives à la boulangerie d’à-côté (€1.70), plus une banane et un poivron au super-marché (€0.86), et me voilà prête pour la journée.

Jusque là, j’ai marché d’ouest à est. Depuis Chatillon, une nouvelle vallée s’ouvre vers le sud. De légers nuages empêchent le soleil de taper aussi fort que hier et je leur en suis reconnaissante.

La VF monte à mi-pente derrière Chatillon et poursuit sa route à plat ainsi pendant longtemps. Historiquement, la VF correspond au trajet qu’a emprunté Sigeric le Sérieux, Archevêque de Canterbury, à son retour de Rome en l’an 990. Le tracé original coupait probablement au plus court dans le fond de la vallée. Mais l’autoroute a aussi voulu passer par là et les promoteurs de la VF actuelle ont choisi pour les pèlerins modernes un tracé un peu à l’écart des grands axes de circulation, mais quand même le long d’anciens chemins de longue distance, tout en visitant souvent des endroits remarquables. Cela rend ce pèlerinage très intéressant et me connecte avec tous les peuples qui ont déambulé par ici avant moi.

Accident de terrain des temps modernes. J’ai dû porter mon sac sur le côté pour passer. Mon poivron qui en dépassait s’est retrouvé étêté.

Ce que je découvre avec surprise dans cette belle Vallée d’Aoste, ce sont ces multiples châteaux et forteresses juchés sur des promontoires pierreux qui dominent ainsi les villes et les villages commes des gardiens d’un autre temps. Ils sont malheureusement difficiles à prendre en photo car camouflés dans la nature.

En effet, l’hiver et la sécheresse font que les paysages sont gris et bruns, comme la pierre des châteaux et forteresses. Sur le net, je trouve des photos de ces mêmes endroits prisent en été et tout y est tellement plus vert. J’imagine que cela s’explique par la multitude de jets d’eau installés sur le moindre lopin.

Une des deux forteresses qui gardent l’entrée de la vallée au sud de Chatillon.

En ce soir de mon troisième jour je loge à Verrès, dans une auberge de la jeunesse. Je suis à nouveau très fatiguée car le dernier tiers de la journée était tout en montées abruptes et descentes vertigineuses mais je suis heureuse d’être là, d’avoir passé ce cap des 3 jours fatidiques, et d’être encore capable de continuer.

Trois jours, c’est ce qu’il faut apparemment pour se mettre au rythme du pèlerinage, pour que le corps s’habitue à ce nouveau régime d’efforts physiques, et que les préoccupations de la vie “normale” passent au second plan.

Par contre pour freiner les idées qui tournent en rond dans ma tête, pour mettre de l’espace entre mes pensées, cela prend du temps, et 3 jours sont bien insuffisants. Or il se trouve que ceci est précisément le but de ce pèlerinage : faire de la place pour le numineux, être en Présence… Ou en tous cas, me donner toutes les chances d’y arriver.

J’ai choisi ici de décrire au quotidien mes impressions sur la Via Francigena au départ d’Aoste. Parce que mon français est un peu rouillé, parce que je suis très lente pour taper tout ça sur mon téléphone et aussi parce que je voudrais être sûre de ne rien oublier d’important, cela me prend beaucoup de temps et d’énergie. Je vais donc m’arrêter là pour l’instant.

Merci de me lire jusqu’ici.

Si vous avez envie de connaître la suite, faites le moi savoir. Cela m’encouragera à reprendre la “plume”, quand le moment sera venu.

En attendant… 4ème jour, petite étape et plein de temps pour aller me faire couper les cheveux chez un coiffeur italien.

Ciao à tutti ❤

4 thoughts on “La Via Francigena d’Aoste à Rome

  1. Je viens de trouver ta page. Merci.C’est vivant (et les fautes ne sont pas gênantes….). Ici la bise a été féroce aujourd’hui.J’ai renoncé à travailler dehors malgré mon intention.mais les montagnes étaient splendides et le lac aussi.Nous, on avait de la chance, l’itinéraire avait été repéré auparavant et on n’avait qu’à suivre, avec pauses-boissons organisées matin midi et après-midi! Du luxe…gros becs

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    1. Merci de m’avoir lue. Je viens aussi de me relire et ai corrigé quelques fautes et changé quelques détails.
      Là, à Ivrea, j’ai bien quitté les montagnes. Jusqu’où étais-tu allée ? Becs

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      1. Pont-Saint-Martin; puis en bus jusqu’à Albiano (où les moustiques étaient voraces, et Bosè en visite finale.

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